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          HIROSHIMA et NAGASAKI 

En août 2021

En octobre 2020

"Et après ...? " (Hiroshima)

 Prélude, lude, et postlude

 de Louis Hiltbrand (mon maître)

 

I Prélude

De toutes les parties du monde montent des cris, des lamentations, des murmures, des appels, des prières, des chants, qui sont la voie même de la vie prenant conscience d'elle même.

 

II Lude

Théme et trois variations (d'inspiration japonaise)

1ère variation : Koto

2me et 3 me variations : instrument à percussions et à vents, réminiscencence de cérémonies boudhiques

 

III Postlude

Mélodie japonaise (Berceuse de la région de Tyugoku dont Hiroshima )

  une mère berce son enfant

  la mort apparait.

  Dors dans l'éternité.

 

terminé le jour de Noél 1978

 

Enregistré en 2003 : CD " Rencontre..."

direction artistique et Production  :

Frédérique Paulhe - L'OEil du Musicien


 

 

75 ans sont passé.....................

 

Messages et témoignages

 

Message de M. Kazumi MATSUI
Maire d’Hiroshima
Président des Maires pour la Paix

 

C’est un honneur et un plaisir pour moi de vous adresser ce message à l’occasion de la Cérémonie Commémorative et du Concert pour Hiroshima et Nagasaki, à Saintes le 6 août 2020.

Le 6 août 1945, la première bombe atomique utilisée dans une guerre entre les hommes réduisit en cendres Hiroshima en un instant, privant de leurs vies d’innombrables civils innocents. Bien que souffrant de profondes cicatrices physiques et affectives, les hibakusha qui parvinrent à survivre racontent ce qui leur est arrivé et appellent sans cesse à la paix avec cette conviction : « Personne d’autre ne doit souffrir comme nous avons souffert. »

Cependant, plus de 13 000 têtes nucléaires subsistent encore à travers le monde et le désarmement nucléaire est au point mort. En outre, malgré la solidarité internationale de plus en plus importante dans la lutte contre le COVID-19, un nouveau type de menace pèse sur l’ensemble de l’humanité : le nationalisme chauvin, qui augmente, et les tensions accrues à travers le monde, du fait de la compétition internationale.

Nos dirigeants actuels doivent se souvenir de leurs courageux prédécesseurs, lorsque les Etats-Unis et l’Union Soviétique, ces deux superpuissances nucléaires, étaient engagés dans une intense course aux armes nucléaires et que leurs dirigeants, faisant preuve de raison, se tournèrent vers le dialogue pour chercher à désarmer. Les dirigeants du monde entier devraient poursuivre de bonne foi des négociations portant sur le désarmement nucléaire, conformément à l’article VI du Traité de Non-Prolifération, et répondre à l’appel de la société civile pour une entrée en vigueur du Traité sur l’Interdiction des Armes Nucléaires, une étape importante sur la route qui mène à un monde sans armes nucléaires.

Pour réaliser un monde pacifique et durable, chacun d’entre nous doit se confronter à la situation actuelle, dépasser les différences de statut ou d’opinion et œuvrer de concert avec les autres en vue de notre idéal. Pour y parvenir, nous ne devons jamais perdre de vue les bombardements atomiques et la guerre, comme autant d’événements du passé. Il est vital que nous tenions compte des progrès que les hibakusha et d’autres personnes ont effectués vers un monde pacifique et que nous poursuivions résolument dans cette direction.

Pour que les dirigeants du monde avancent ensemble vers l’idéal de la société civile, il est d’une importance croissante que ceux de ses membres qui sympathisent avec la cause défendue par les hibakusha soient de plus en plus nombreux. Un monde libéré des armes nucléaires est la première étape vers la paix sur Terre, et cette idée doit devenir une valeur universelle partagée par toute l’humanité. C’est pourquoi il est réellement important que vous vous soyez rassemblés et ayez organisé cet événement pour appeler à un monde en paix, libéré des armes nucléaires, et je vous exprime mon plus profond respect.

Les Maires pour la Paix rassemblent plus de 7900 villes-membres situées dans 164 pays et régions. Ils s’efforcent de créer un environnement qui incite les dirigeants du monde à prendre des mesures concrètes en vue de l’abolition nucléaire. J’aimerais demander à chacun de vous de vous mobiliser avec nous pour éliminer ce mal absolu que sont les armes nucléaires et établir une paix durable dans le monde.

En conclusion, je vous adresse mes meilleurs vœux pour le plein succès de cet événement ainsi que pour la santé et le bonheur de toutes les personnes concernées.

Le 6 août 2020
Kazumi MATSUI
Président des Maires pour la Paix
Maire d’Hiroshima

(Traduction ACDN)

***

Message de M. Tomihisa TAUE
Maire de Nagasaki
Vice-Président des Maires pour la Paix

Au nom des citoyens de Nagasaki, j’aimerais adresser ce message à la « Flamme du Désarmement Nucléaire ».

A 11h 02 le matin du 9 août 1945, Nagasaki fut dévastée par une seule bombe atomique. Plus de 74 000 précieuses vies humaines furent arrachées, et quelque 75 000 autres personnes furent blessées. Encore aujourd’hui, ceux qui parvinrent à survivre gardent de profondes cicatrices physiques et mentales qui ne guériront jamais, et continuent de souffrir des séquelles de l’exposition aux radiations.

Les hibakusha, ceux qui ont vécu en première ligne la terreur des armes nucléaires, n’ont cessé de transmettre leurs pénibles expériences et d’appeler à l’abolition des armes nucléaires, pour s’assurer que personne d’autre dans le monde ne vivra jamais la tragédie d’un bombardement atomique. Cependant, 75 ans ont passé depuis ces bombardements et le nombre d’individus qui peuvent raconter leur expérience s’amenuise avec chaque année qui passe. Le temps où il n’y aura plus aucun hibakusha se rapproche de nous à chaque seconde.

Sa Sainteté le Pape François a déclaré : « Un monde sans armes nucléaires est possible et nécessaire ». En novembre dernier, lors de sa visite à Nagasaki, Sa Sainteté a adressé au monde ce message fort et explicite depuis l’hypocentre, à 500 mètres au-dessus duquel la bombe a explosé.

Sa Sainteté a aussi déclaré que chacun doit œuvrer à la réalisation d’un monde sans armes nucléaires.

Inspirés par les mots du Pape François, nous, civils et citoyens, nous devons nous liguer et continuer à élever nos voix pour réaliser l’abolition des armes nucléaires aussi tôt que possible. Les efforts inestimables de chaque personne peuvent devenir une formidable force motrice qui nous conduira à la paix.

Par la cérémonie de la « Flamme du Désarmement Nucléaire » tenue cette année 75 ans après le bombardement atomique, je vous souhaite de partager notre désir de paix et notre appel à l’abolition des armes nucléaires.

Août 2020

Tomihisa TAUE
Maire de Nagasaki

(Traduction ACDN)

       Bun HASHIZUME

           Une des Hibakusyas

En août 2020

75 ans après : grand moment d’émotion à Saintes en mémoire des victimes d’Hiroshima et de Nagasaki

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




Publié le 9 août 2020
 

Malgré le coronavirus et ses mesures de rassemblement restrictives, ils sont plus de 150 à être venus, parfois de loin, pour commémorer les massacres atomiques qui ont jeté l’humanité dans l’ère nucléaire, et entendre le concert à quatre mains que deux grandes pianistes, la japonaise Yuko Hirota et la française Alice Rosset, ont donné à Saintes, le 6 août 2020, en hommage aux victimes des bombardements atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki le 6 et le 9 août 1945.

 

Avec le soutien moral et technique de la ville de Saintes, l’événement était organisé par l’Action des Citoyens pour le Désarmement Nucléaire (ACDN). Fondée en 1996, cette ONG basée à Saintes et membre d’ "Abolition 2000", le réseau international d’ONG et de municipalités qui visent l’abolition des armes nucléaires mais aussi la sortie du nucléaire civil par la sobriété énergétique et le développement des énergies renouvelables, poursuit ces objectifs.

La ville de Saintes elle-même a adhéré en juin 2000 au réseau "Abolition 2000". Depuis 2008, elle est également adhérente des "Maires pour la Paix", un réseau mondial de villes qui réclament l’abolition des armes nucléaires, sous la présidence du maire d’Hiroshima et la vice-présidence, notamment, du maire de Nagasaki.

A 10h 30, le concert débute avec une pièce de Louis Hilbrand intitulée "Et après..." (Après Hiroshima...), jouée par Yuko Hirota. Louis Hilbrand, aujourd’hui décédé, a été le maître de Yuko à Genève. Alice Rosset enchaîne avec le Nocturne N¨° 13 en Do mineur de Chopin. Puis les deux pianistes jouent ensemble la Fantaisie en Fa mineur de Schubert. Autant d’instants émouvants de puissance esthétique.

 

Le concert est alors suspendu pour faire place à la cérémonie en mémoire des victimes d’Hiroshima et de Nagasaki.

Jean-Marie Matagne, président d’ACDN, donne lecture des messages envoyés par Kazumi Matsui, maire d’Hiroshima et président des Maires pour la Paix, et par Tomihisa Taue, maire de Nagasaki. (Voir ci-après)

Ammar Berdaï, maire-adjoint de Saintes, prend ensuite la parole au nom de la Ville de Saintes. Il excuse d’abord Bruno Drapron, maire de Saintes, empêché de venir par l’exercice de ses fonctions de président de la Communauté d’agglomération, puis il rappelle que l’engagement de la Ville en faveur de l’abolition des armes nucléaires remonte à plus de vingt ans, exactement à juin 2000, pendant le mandat de Michel Baron, et que la Flamme du désarmement nucléaire fut allumée pour la première fois à Saintes en mai 2001 par Bernadette Schmitt, alors maire, à l’occasion des 1e "Journées du Désarmement Nucléaire" (JDN). (Voir ci-après)

 

Benoît Biteau, paysan de profession, récemment élu député pour représenter la Région "Nouvelle Aquitaine" au Parlement Européen, explique le sens de sa présence régulière, chaque année, aux cérémonies des 6 et 9 août à Saintes. C’est la vie qu’il s’agit de défendre contre toutes les "menaces ultimes", la pire de toutes étant assurément le risque d’une autodestruction de l’humanité par l’atome. Il souligne notamment que la menace radioactive peut être d’origine civile autant que militaire, comme l’ont prouvé les catastrophes de Tchernobyl et de Fukushima.

Catherine Quéré, ancienne députée de Saintes et Saint Jean d’Angély pendant dix ans, explique à son tour pourquoi elle avait résolument soutenu auprès de ses collègues de tous bords la Proposition de Loi visant à organiser un référendum sur la participation de la France à l’abolition des armes nucléaires qu’ACDN lui avait soumise en 2015, pour aboutir en avril 2017, à la veille du renouvellement du Parlement, à 126 signatures parlementaires sur les 185 signatures requises (les deux-tiers). (Voir ci-après)

Patrick Moquay, ancien maire de Saint Pierre d’Oléron, ville qu’il avait fait adhérer, comme Saintes, au réseau "Abolition 2000" et aux "Maires pour la Paix", donne alors lecture de la liste des 46 députés et sénateurs du Parlement renouvelé, aujourd’hui signataires de la Proposition de Loi référendaire, elle aussi renouvelée. Un appel est lancé aux citoyens présents à la cérémonie pour qu’ils encouragent leurs élus parlementaires à cosigner cette Proposition de Loi. (Voir ci-après)

 

Yuko Hirota lit des extraits du témoignage émouvant que Setsuko Thurlow, hibakusha et militante de longue date en faveur de l’élimination de toutes les armes nucléaires, avait porté à Oslo en 2017, lors de la remise du prix Nobel de la Paix à la Campagne Internationale pour Abolir les Armes nucléaires (ICAN).

 

Ammar Berdaï dépose au monument aux morts une gerbe au nom de la mairie de Saintes, puis trois jeunes enfants français et japonais, Titouan, Mina et Kan, en déposent une autre au nom d’ACDN.

 

Mina, fillette franco-japonaise de 6 ans, rallume la Flamme du Désarmement nucléaire, que deux hibakusha membres de la Mission d’Hiroshima pour la paix mondiale en visite à Saintes en juillet 2004, avaient déjà rallumée et portée fièrement à travers la ville. A l’issue de leur conférence, l’un d’eux déclara : "Après Hiroshima, Saintes sera désormais la deuxième ville dans mon coeur".

Toutes les personnes présentes se lèvent alors pour respecter une minute de silence en hommage aux victimes, tandis que Yuko Hirota fait résonner une coupelle en cuivre et que trois anciens combattants porte-drapeaux de l’ULAAC (Union Locale des Associations d’Anciens Combattants) abaissent leurs drapeaux.

Le concert reprend, avec Alice Rosset jouant la Partita n° 1 de Jean-Sébastien Bach, les deux pianistes jouant ensuite à quatre mains deux pièces de Ravel et pour finir "Jésus, que ma joie demeure" de JS Bach.

Photo de Jean-
Christophe Pratt

Leur prestation est saluée par une longue ovation debout, qui entraîne une reprise.

 

En dépit de la pandémie du COVID-19 qui mobilise à juste titre les énergies à travers le monde mais tend à faire oublier toutes les autres menaces suspendues au-dessus de nos têtes, il fallait commémorer les drames d’Hiroshima et de Nagasaki pour mieux souligner l’extraordinaire gravité actuelle du danger nucléaire et proclamer, de concert avec les hibakusha, les survivants de la Bombe : "Plus jamais ça pour personne, nulle part !" .

Reportage photographique en noir et blanc de Jean-Christophe Pratt

 

***

Intervention d’Ammar Berdaï, Maire-adjoint de Saintes

Bonjour Mesdames, bonjour Messieurs,

Je vous prie de bien vouloir excuser M. le Maire, M. Bruno Drapron, retenu par d’autres obligations. Il aurait aimé être lui-même présent. Il m’a confié le soin de m’exprimer en son nom et au nom de la ville de Saintes.

Cette cérémonie est devenue une tradition très importante dans notre ville et plus particulièrement cette année où l’on commémore le 75ème anniversaire des bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki des 6 et 9 Aout 1945.

Saintes à adhéré en juin 2000, du temps de M. Michel Baron, maire de Saintes, au réseau « abolition 2000 », puis quelques années plus tard au réseau des « Maires pour la paix ».

Nous ne pouvons qu’être fiers que notre ville soit adhérente à ces réseaux internationaux, qui tous deux veulent abolir les armes nucléaires.

En 2001 la première Flamme du désarmement nucléaire a été allumée par Mme Bernadette Schmitt, alors Maire.

Saintes a accueilli de nombreux évènements nationaux et internationaux en rapport avec la dénucléarisation militaire et civile de notre planète, au cours des deux dernières décennies.

En 2006 et 2008 lors des 2ème et 3ème Rencontres internationales pour le désarmement nucléaire, biologique et chimique, les arbres d’Hiroshima et de Nagasaki ont été plantés à la Palu.

L’Action des Citoyens pour le Désarmement Nucléaire, ONG nationale basée à Saintes, pourra compter sur l’actuelle municipalité pour lui apporter tout son soutien afin de perpétuer cette tradition.

« Un monde sans armes nucléaires, c’est le rêve de toute l’humanité. »

***

Intervention de Catherine Quéré

Mon ami Jean-Marie m’a demandé de bien vouloir expliquer ici, en tant qu’ancienne députée élue dans la circonscription de Saintes et Saint Jean d’Angély, l’intérêt et l’importance de la Proposition de Loi référendaire qu’il m’avait soumise en 2015-2016 au nom de l’Action des Citoyens pour le Désarmement Nucléaire.

J’avais approuvé et soutenu activement cette Proposition de Loi auprès de mes collègues de tous bords, si bien qu’en avril 2017, lorsque le Parlement fut renouvelé, elle avait recueilli 126 signatures sur 185, soit les deux-tiers du nombre requis pour que le référendum d’initiative partagée franchisse la première étape de sa procédure.

Je pense que cette démarche est juste, et je la soutiens toujours en tant que simple citoyenne. Les armes nucléaires et radioactives sont des armes horribles. Non seulement elles peuvent massacrer des centaines de milliers ou des millions de personnes d’un seul coup, mais en plus, leur radioactivité attaque l’ADN des cellules, provoquant des maladies fatales comme le cancer, les maladies cardio-vasculaires et, pire que tout, les anomalies génétiques et la naissance d’enfants monstrueux.

Elles peuvent remettre en cause à tout moment la vie de chacun d’entre nous et la survie de l’humanité. A quoi bon lutter contre la détérioration du climat, si c’est provoquer l’apocalypse ? Nous devons en débarrasser la planète. Et nous le pouvons, pourvu que nous saisissions l’outil du référendum pour amener la France à remplir son devoir et convoquer les autres Etats dotés de ces armes terribles aux négociations prévues par l’article 6 du Traité de Non-Prolifération, qu’ils ont signé.

Tel est le sens de ma présence aujourd’hui parmi vous. Je vous souhaite, je nous souhaite de poursuivre ce combat.

***

 

Les extraits du livre « Le jour où le soleil est tombé…


J’avais quatorze ans à Hiroshima Bun HASHIZUME, (aujourd’hui 89 ans en 2020)
Le matin du 6 août…

 

P.25
Soudain, la baie vitrée sur ma gauche à émis l’éclaire, un rayonnement lumineux gigantesque concentrant le spectre des sept couleurs, était d’une puissance aveuglante.
«Dans l’instant, je me suis dit :
« Le soleil est tombé ! »
« L’univers s’est détraqué ! «
Autour de moi régnait un silence étrange. Pas le moindre bruit.
Après un moment, je sentis un liquide chaud et épais couler le long de mon bras droit.

Derrière ce livre
Assise là, je regardais la ville.
« Mais qu’a-t-il bien pu se passer ?... »
La ville qui était encore là ce matin avait disparue. Aussi loin que je pouvais voir, tout avait été rasé.
« Est-ce vraiment la réalité ? »

 

P.33
Des gens, des gens et des gens ; les uns qui marchent avec la peau qui pendait en lambeaux ou qui essayaient de remettre leurs intestins en place, d’autre complètement noirs de suie, d’autre qui tentaient de repousser leurs globes oculaires sortis de leurs orbites, d’autre tellement brûlés Qu’ils n’avaient plus ni yeux ni nez et dont les plaies suintait…. d’autre dont on ne pouvait distinguer s’ils étaient de face ou dos ou encore des gens dont on ne pouvait dire ni l’*age ni le sex. […]
Ces gens, brûlés surtout le corps, écorchés,marchaient sans un mot en titubant et en laissant leurs mains pendre devant eux à hauteur de poitrine.[…]
Il y avait beaucoup de gens qui n’avaient de cheveux que le sommet du crâne. Pouvaient-ils
tous sortir ainsi de chez coiffeur ? Et puis même, quelle coiffure bizarre ! En fait, les gens qui portent un chapeau n’avaient gardé leurs cheveux qu’à l’endroit du chapeau, tout le reste, le visage, le cou et le reste du corps était brûlé et écorché.|… ) « Comment est-ce possible qu’ils soient tout dans cet état ? »
« Qu’est-ce qui a bien pu se passer ? »

 

p.135
On ne ressentait quasiment pas la douleur. […]
Nous étions tellement choqués que nous transcendions notre éta t physique et psychique ordinaire.

 

p.112
Aujourd’hui encore, chaque fois que je vois un coucher de soleil et sa beauté dantesque, je me souviens des couchers de soleil sur Hiroshima les jours qui suivirent le bombardement atomique.
Des couchers de soleil qui m’en faire de mal, moi qui vivais dans la torpeur, à mi-chemin entre la vie et la mort. [...]
Ces couchers de soleil avaient quelque chose d’effroyable.
Crépuscules sur une ville morte et désolée. Après les chaleurs écrasante de la journée, lorsque ce ciel bleu frénétique virait au bleu cobalt, une brise descendue des hauteurs apportait un peu de fraîcheur.
« Ah ! … Encore une journée qui prend fin... »
Je ne regrettais pas le temps écoulé, ni n’avais d’espoir pour le lendemain, mais quand venait le soir, je m’isolais et, debout sur les gravats calcinés, je contemplais.
Ce ciel passait ensuite du bleu de cobalt au mauve pâle et du mauve pâle au rouge violacé léger.
Chaque jour, j’étais là, debout, enchantée par les changements de couleur du ciel à ce moment de la journée.

Le violet du ciel se faisait ensuite de plus en plus sombre. Mais lorsque le soleil descendait derrière les lignes douces du Mont Koï, à l’ouest d’Hiroshima, soudain le ciel s’enluminait d’une couleur d’or.
Le ciel redevenait lumineux, éblouissant. Le crépuscule teintait rapidement le ciel d’un jaune doré et dans mon corps tout entier raisonnait la couleur du ciel ressuscité.
« Ah !… Je vis ! Que c’est bon d’être en vie ! »
Je savourais ma joie d’être encore en vie ce jour-là et de pouvoir encore une fois contempler le coucher de soleil.

J’aimerai présenter une personne exceptionnelle :

Bun Hashizume

 

APPEL DE HASHIZUME BUN, SURVIVANTE DE LA BOMBE ATOMIQUE D'HIROSHIMA, AU PEUPLE DU JAPON ET AU MONDE

29 Mars 2011

Je m'appelle Hashizume Bun et je suis une survivante de la bombe atomique d'Hiroshima. J'habite à Tokyo et j'ai maintenant 80 ans. Quand le Grand Tremblement de Terre de l'Est du Japon a frappé le 11 Mars 2011, entraînant la crise à la centrale nucléaire de Fukushima, j'étais en train d'écrire à propos de l'exposition aux radiations conséquente au bombardement atomique il y a 66 ans et de la vie des habitants d'Hiroshima avant et après l'explosion.

Bien que mon texte était presque fini, j'ai été profondément attristée par l'accident impliquant la centrale nucléaire de Fukushima et j'ai senti l'envie de conclure mes réflexions – et de les partager en anglais également – du point de vue du bombardement d'Hiroshima, la ville où je suis née.

Quand le tremblement de terre a frappé, j'étais à Tokyo. Plus tard je suis allée à Hiroshima. Quand je suis arrivée dans la ville bombardée, la nuit était tombée et je senti un grand poids sur mes épaules. Il me fallut un moment avant de pouvoir me mettre en marche.

Chaque fois que je reviens à Hiroshima, la première chose que je fais est de visiter le Parc Mémorial de la Paix et je m'adresse aux membres de ma famille, à mes amis, à mes connaissances et aux autres victimes qui sont tombées dans l'horreur inimaginable du bombardement atomique. Cette fois, je leur ai demandé d'écouter mon souhait plutôt que ma prière.

S'il vous plaît permettez à ma santé de se maintenir.

S'il vous plaît accordez-moi la force.

S'il vous plaît guidez-moi et dirigez-moi dans mes efforts.

Le jour du bombardement atomique, j'ai été exposée aux radiations de la bombe à une distance de 1km5 de l'épicentre. J'ai aussi été grièvement blessée mais je suis parvenue à survivre à l'explosion grâce à l'aide d'autres personnes.

Après la guerre, j'ai vécu dans une hutte faite de bric et de broc dans la ville calcinée et j'ai souffert de symptômes aigus d'exposition aux radiations, dont une forte fièvre, des saignements des gencives, des diarrhées épouvantables, des vomissements, des boutons violets sur tout le corps et la perte de mes cheveux. C'est un miracle que j'ai survécu de nouveau.

Depuis ce temps, et c'est encore le cas aujourd’hui, j'ai souffert de toute une variété de maladies et je n'ai jamais eu un seul jour de pleine santé.

Parmi ces nombreuses maladies, une a été particulièrement difficile. Le symptôme de cette « maladie de la bombe A » est une fatigue insoutenable. J'ai supplié mon docteur de me rendre ma fraîcheur et ma légèreté, même pour une journée, même pour une heure, mais cela n'est jamais arrivé. Quand je me couchait le soir, je priais Dieu en lui disant : « Faites que je ne me réveille pas demain. »

Cette santé déplorable était causée par l’exposition de mes organes internes aux radiations de la bombe. Une fois que les substances radioactives sont ingérées au travers de l'eau, des aliments ou de l'air, ces substances continuent à être radioactives indéfiniment, détruisant les cellules du corps et abîmant les gènes. C'est un sort que l'on porte toute sa vie.

Jusqu'à ma récente visite à Hiroshima, je ne savais pas que la particule appelée « Césium », dont on a beaucoup parlé dans les médias ces derniers jours, endommage les muscles et provoque la terrible « maladie de la bombe A ».

Les personnes qui sont exposées à la pluie noire ou celles qui pénètrent la ville pour apporter leur aide ou rechercher les disparus ont tous été victime d'exposition interne. Et au delà des survivants de la bombe A, ceux qui ont souffert d'essais nucléaires ou d’accidents de centrales nucléaires sont également victimes de l'exposition interne aux radiations.

L'information à propos de l'exposition interne aux radiations a longtemps été cachée au public. Depuis l'accident à la centrale de Fukushima, l'expression « exposition interne aux radiations » est enfin prononcée, mais aucune explication détaillée n'a été présentée. Il sera difficile au gouvernement de continuer sur la voie de l'énergie nucléaire si ces informations sont révélées.

L'énergie nucléaire a été louée pendant un temps comme « l'énergie propre » ou même « l'énergie idéale », mais cet enthousiasme s'est refroidi après les accidents aux centrales de Chernobyl et Three Mile Island. Pourtant ces dernières années, de nombreux pays ont construit des centrales nucléaires et cette époque a été surnommée la « renaissance » du nucléaire. En regardant ce phénomène, je ne pouvais m'empêcher de penser qu'un jour, dans un avenir proche, il y aurait un autre accident dans une centrale nucléaire quelque part dans le monde.

L'accident s'est produit dans mon pays, et maintenant une grande quantité de produits radioactifs continuent de fuir dans l’environnement depuis la centrale nucléaire en ruine. Il n'y a aucun moyen de l'arrêter entièrement, et on ne voit pas le bout de cette crise. Dans ce petit pays qu'est le Japon, qui souffre de tremblements de terre fréquents, plus de 50 réacteurs nucléaires ont été construits. Ces réacteurs trônent essentiellement dans des zones peu habitées, des zones à fort risque sismique.

Le Grand Tremblement de Terre de l'Est du Japon a compromis les 6 réacteurs de la centrale de Fukushima. Les experts annoncent que d'autres tremblements de terre de cette magnitude - des tremblements de terre qui frapperaient à proximité d'autres centrales nucléaires - se produiront avec une certitude de 100% dans un avenir proche.

Au peuple du Japon, je demande : Allons-nous accepter que le Japon, le pays qui a reçu la bombe atomique, engendre une exposition catastrophique aux radiations au niveau mondial ?

Le temps est court. Nous devons travailler ensemble pour stopper les centrales nucléaires qui sont en opération. Peuples du monde, joignez les mains et demandez haut et fort l'arrêt de la construction de nouvelles centrales nucléaires, demandez haut et fort l'arrêt de toutes les centrales nucléaires sur la terre.

En tant que survivante de la bombe A, j'ai longtemps été contre l'énergie nucléaire au Japon et dans le monde. La raison en est que je craignais, pas seulement les bombes atomiques, mais aussi la possibilité qu'un jour l’énergie nucléaire détruise toute vie sur cette planète. Même les centrales nucléaires en opération relâchent continuellement des petites doses de substances radioactives dans l'environnement, contaminant la terre, la mer et le ciel. Le danger de ces petites quantités de substance radioactives est aussi dissimulé.

Les êtres humains ne sont pas les seuls êtres vivants. N'est-ce pas arrogant que les êtres humains sacrifient d'autres êtres vivants simplement pour leur propre bénéfice ? Ne serait-il pas plus sage que les êtres humains vivent en harmonie avec la nature ? Il est accordé à l'humanité du 20ème et du 21ème siècles un bref instant dans l'histoire de notre espèce. Cet instant nous a été légué par nos ancêtres et nous allons à notre tour le léguer à nos descendants.

Comme les survivants de la bombe atomique et les victimes de test nucléaires et d’accidents de centrales, les victimes de l'accident de la centrale de Fukushima devront faire face à la souffrance toute leur vie. Les personnes déplacées par les nombreux désastres dans l'est du Japon font face avec courage à la vie dans les refuges. Pourtant, même dans ces terribles conditions, les enfants gardent leur innocence et leur espoir. Cela m'émeut et me fait espérer.

Les radiations sont particulièrement néfastes pour les enfants et leur croissance. Néanmoins, le gouvernement japonais et les compagnies d'électricité disent qu'ils vont continuer à construire encore plus de centrales nucléaires au Japon, ce petit pays frappé par les tremblements de terre.

Les radiations ne respectent pas les frontières. Pour sauver nos enfants, l'avenir de notre espèce, j'appelle le peuple du Japon et les peuples du monde à s'unir et à s'opposer à la poursuite de l'énergie nucléaire.

 

Traduit par Marianne Souliez

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